Qu’est-ce que la réception des travaux ?
La réception est, dans le langage courant, le fait de recevoir quelque chose. En droit de la construction, la réception de travaux est définie à l’article 1792-6 du code civil. Il s’agit d’un acte juridique par lequel le maître de l’ouvrage accepte l’ouvrage. Cette acceptation peut être faite avec ou sans réserves de la part du maître d’ouvrage.
Un acte juridique provient d’une manifestation de volonté, de la part d’une ou plusieurs personnes, de créer un effet de droit. Il s’oppose traditionnellement au fait juridique, qui crée également un effet de droit, mais sans manifestation de volonté de la part de ses auteurs. Ici, le maître d’ouvrage manifeste sa volonté d’accepter l’ouvrage. La réception des travaux est donc un acte juridique. Ce dernier est également :
- Unilatéral. En effet, la manifestation de volonté provient du maître de l’ouvrage seulement. Lui seul peut, dans un cadre amiable, prononcer la réception. Il peut néanmoins mandater une autre personne pour prononcer la réception des travaux à sa place, en son nom et pour son compte.
- Contradictoire. Le caractère contradictoire signifie que les entrepreneurs ayant pris part à la construction de l’ouvrage doivent avoir été convoqués pour la réception.
Quand est-ce que la réception des travaux intervient ?
Le plus fréquemment, la réception intervient à l’achèvement des travaux. Le constructeur notifie au maître de l’ouvrage que les travaux sont terminés afin de procéder à la réception. La réception peut parfois intervenir même lorsque les travaux ne sont pas encore achevés, en cas d’abandon de chantier par exemple.
La réception peut avoir lieu même si des malfaçons apparentes sont constatées : elles devront alors faire l’objet de réserves au sein du procès-verbal de réception.
Les deux formes de la réception de l’ouvrage
Conformément aux dispositions de l’article 1792-6 précité, la réception est prononcée en principe à l’amiable, mais à défaut judiciairement.
La réception amiable
La réception amiable est la manifestation de la volonté du maître de l’ouvrage de recevoir celui avec ou sans réserve.
Elle est idéalement prononcée expressément, mais peut également être tacite.
La réception expresse
Forme amiable de réception, la réception expresse est prévue à l’article 1792-6 du code civil. Le maître de l’ouvrage accepte l’ouvrage, un procès-verbal est établi. La forme du procès-verbal est libre, néanmoins ce document devrait idéalement contenir, la signature du maître de l’ouvrage, une date, les travaux objet de la réception ainsi que le rappel de la convocation du constructeur.
À ces s’ajoutent éventuellement les réserves formulées par le maître d’ouvrage. Les désordres apparents doivent absolument être signalés par le maître d’ouvrage sous forme de réserves dans le procès-verbal. S’il accepte les travaux en l’état, sans « réserver » les désordres apparents, le maître d’ouvrage n’aura plus de recours par la suite contre l’entrepreneur. C’est « l’effet de purge » de la réception. En effet, la garantie décennale et la garantie biennale ne peuvent être mise en œuvre que si les désordres étaient cachés à la réception. La garantie de parfait achèvement couvre quant à elle les désordres cachés ou réservés à la réception.
Lors de la réception, le maître d’ouvrage effectue une visite des travaux et signale sous forme de réserves toute anomalie apparente : malfaçon, non-conformité, équipements défectueux, etc. Il peut choisir d’être accompagné d’un professionnel (architecte, expert, maître d’œuvre) afin que ce dernier puisse l’assister dans l’identification des désordres.
Il revient ensuite à l’entrepreneur de lever les réserves. Par exemple, si des défauts de conformité sur certains équipements sont signalés dans le procès-verbal, l’entreprise responsable des travaux devra procéder à leur correction. Le carrelage par exemple posé dans la maison devra être remplacé par du parquet si le contrat prévoyait cette prestation, sans que le prix soit modifié pour le client.
La réception tacite
La réception tacite n’est pas mentionnée par la loi, et la lecture des travaux parlementaires montre même qu’elle n’était pas souhaitée. Mais, confrontée à la réalité pratique de l’absence massive de réceptions expresses, la Cour de Cassation a rapidement retenu que la réception tacite n’était pas interdite par la loi.
Ici, le maître d’ouvrage n’a pas accepté expressément l’ouvrage, mais ses actions permettent de caractériser sa volonté non équivoque d’accepter l’ouvrage.
Les juridictions du fonds doivent utiliser un faisceau d’indices pour caractériser cette volonté mais les deux critères principaux sont :
- La prise de possession de l’ouvrage ;
- Le paiement intégral ou quasi intégral du prix.
La charge de la preuve d’une réception tacite repose sur la partie qui l’invoque. Cela étant, lorsque les deux critères principaux qui viennent d’être exposés sont réunis, la charge de la preuve est inversée et une présomption de réception tacite existe.
La réception judiciaire
La réception judiciaire trouve également sa source au sein de l’article 1792-6 du code civil. Elle ne peut être réalisée concomitamment avec une réception expresse ou après celle-ci. Si une réception expresse a déjà eu lieu, la Cour de cassation a retenu que la forme judiciaire est exclue.
Il peut arriver que le maître de l’ouvrage refuse la réception. C’est là que la réception judiciaire intervient : le constructeur demande au juge de prononcer la réception de l’ouvrage.
Pour que la réception judiciaire puisse être prononcée, le juge doit vérifier que l’ouvrage est en état d’être reçu. Cela implique, par exemple :
- Qu’un immeuble d’habitation soit habitable.
- Que les travaux ne soient pas affectés d’un désordre trop important.
- Que l’achèvement de l’immeuble soit suffisant au regard des obligations contractuelles de l’entreprise ayant procédée aux travaux
Dès lors que l’ouvrage est en état d’être reçu, le maître de l’ouvrage ne peut valablement refuser la réception. Son refus est considéré comme abusif. Le juge qui prononce la réception en fixe la date au jour où la construction était en état d’être reçue. Néanmoins, rien n’empêche que des réserves soient mentionnées.
Les conséquences de la réception des travaux
Point de départ des responsabilités et garanties légales des constructeurs
La réception de l’ouvrage constitue le point de départ des responsabilités et garanties légales des constructeurs :
- La garantie de parfait achèvement, qui peut être mise en place dans un délai d’1 an.
- La garantie biennale bon fonctionnement, qui peut être mise en place dans un délai minimum de 2 ans.
- La responsabilité décennale, qui peut être mise en place dans un délai de 10 ans.
- La responsabilité contractuelle résiduelle des constructeurs parfois dite de « droit commun », par exemple pour les dommage
Pour en savoir plus, vous pouvez consulter notre article sur les garanties existantes en cas de malfaçons.
Si une malfaçon est déjà constatée alors que le chantier n’est pas terminé et que la réception n’a pas eu lieu, le maître d’ouvrage peut engager la responsabilité contractuelle de droit commun de l’entrepreneur mais ne peut pas encore se prévaloir de la garantie décennale, biennale et de parfait achèvement.
- Le transfert des risques.
Par principe, la réception marque le moment où les risques qui pèsent sur l’ouvrage sont transférés du constructeur au maître de l’ouvrage.
L’obligation de paiement du solde du prix.
Sauf si une retenue de garantie conforme à la loi du 16 juillet 1971 est convenue dans le contrat d’entreprise, la réception implique en principe pour le maître de l’ouvrage, l’obligation de payer le solde du prix des travaux à l’entrepreneur.
La loi du 16 juillet 1971 prévoit la possibilité de convenir d’une retenue de garantie sur le paiement du prix des travaux, limitée à 5% et à la garantie de la levée des réserves émises lors de la réception.