La souscription d’un contrat d’assurance vie par des époux mariés sous le régime de la communauté avec dénouement au second décès, a pour principal avantage de permettre la conservation de l’antériorité fiscale au bénéfice du conjoint qui, au premier décès, dispose de l’intégralité des droits affectés au contrat.
Cette typologie d’assurance peut entrainer des problématiques au moment de la liquidation et du partage, notamment lorsque la souscription a été financée par le biais de deniers communs.
Ainsi peut apparaître la question de savoir si, le contrat s’assurance vie alimenté par des fonds communs, constitue un bien propre pour le conjoint survivant, lorsqu’il n’est pas dénoué au premier décès.
Dans le cas présenté, des époux souscrivent conjointement un contrat d’assurance vie financé par la communauté. Au décès de l’épouse, le contrat n’est pas dénoué et se poursuit au bénéfice de l’époux survivant. Lors de la disparition de ce dernier, une partie des héritiers demande que soit réintégrée dans l’actif successoral de l’épouse, la moitié de la valeur du capital décès.
La Cour d’appel saisie des griefs rejette la demande et justifie sa décision par le fait que, qu’au décès de l’épouse, indépendamment du fait que la prime d’assurance vie ait été financée par la communauté, son époux était attributaire du contrat, constituant par conséquent un propre pour lui. Les juges retiennent l’application de l’article L 132-16 du Code des assurances qui prévoit que le bénéfice de l’assurance contractée par un époux commun en bien en faveur de son conjoint, constitue un propre pour celui-ci.
La deuxième chambre civile censure cette position et casse et annule l’arrêt. Pour la Haute juridiction, puisque le contrat d’assurance vie n’est pas dénoué au décès de l’épouse et s’est poursuivi au bénéfice de l’époux seul souscripteur, sa valeur constitue donc un actif de la communauté, dont la moitié devait être réintégrée dans l’actif successoral de l’épouse.
La Cour de cassation rend sa décision au visa des articles 1134 (dans sa rédaction antérieur) et 1401 du Code civil, tenant pour le premier à la force obligatoire des contrats, et pour le second, au fait que la communauté est constituée des acquêts fait par les époux, ensemble ou séparément durant le mariage, provenant tant de leur industrie personnelle que des économies faites sur les fruits et revenus de leurs biens propres.
La Cour précise ainsi que le bénéfice de l’article L 132 du Code des assurances ne vaut que lorsque le contrat est souscrit par un seul des époux commun en bien. Au décès de l’épouse le mari n’a pas pris la qualité de bénéficiaire, ni opéré un rachat ou une modification de la clause de bénéficiaire, par conséquent, en vertu des dispositions du Code civil, l’assurance est un actif de la communauté.
A noter que sur le plan fiscal, depuis une réponse ministérielle de 2016 (CIOT n°78192), pour les successions ouvertes depuis le 1er janvier 2016, la co-souscription d’un contrat d’assurance vie par des époux mariés sous le régime de la communauté, avec clause de dénouement au second décès, ne figure pas à l’actif de communauté à liquider, et la moitié de la valeur de ce contrat ne figure donc pas à l’actif successoral du conjoint pré-décédé, même en l’absence de clause préciput ou d’attribution au conjoint survivant.
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Référence de l’arrêt : Cass. civ 2ème 26 juin 2019 n°18-21.383