Rôle et obligations du notaire
Le notaire est un officier public chargé d’une mission de service public. On le retrouve dans plusieurs domaines de la vie courante, tels que le droit de la famille, le droit immobilier, le droit des successions. Sa mission la plus connue du grand public est la rédaction d’actes authentiques. Ils sont à différencier des actes sous seing privé, qui ne sont pas rédigés par un officier public, mais bien souvent établis par les parties elles-mêmes ou par un tiers qui n’a pas la qualité d’officier public. De ce fait, la protection juridique de l’acte sous seing privé est plus faible que pour l’acte authentique. L’acte authentique est quant à lui doté d’une force exécutoire : il produit les mêmes effets qu’un jugement définitif. Certaines situations nécessitent de passer obligatoirement par un notaire, comme l’établissement d’un contrat de mariage ou la vente d’un bien immobilier.
Ce statut particulier des notaires impose des règles strictes :
- Obligation de conseil et d’information. En contrepartie de sa capacité à rédiger et fournir des actes authentiques à son client, le notaire est soumis à une obligation de conseil et d’information très stricte. Le conseil qu’il délivre lui permet d’adapter au mieux l’acte notarié à la volonté des parties et de garantir sa sécurité juridique. Cela implique notamment :
- « Les compétences et connaissances personnelles du client ne libèrent pas le notaire de son devoir de conseil ». Les juges estiment que même si le client présente des compétences lui permettant d’être mieux informé du fait de sa profession qu’un autre, le notaire doit tout de même satisfaire son obligation de conseil.
- Le notaire ne peut refuser de rédiger un acte conforme à la volonté libre et éclairée des parties.
- Obligation d’impartialité. Le notaire ne doit pas favoriser une partie au détriment d’une autre. Par exemple, lors d’une vente immobilière, le notaire doit rester impartial face aux deux parties au contrat de vente : l’acheteur et le vendeur. Il doit toujours respecter la volonté des parties et agir dans leur intérêt.
- Obligation au secret professionnel. Comme pour de nombreuses professions, le notaire est tenu au secret professionnel. Cette obligation intervient peu importe la mission qui lui a été confiée. Le Règlement national des notaires dispose ainsi que « le secret professionnel du notaire est général et absolu ».
Si ces obligations ne sont pas respectées, un litige survient et la responsabilité du notaire peut être engagée.
La responsabilité du notaire
En cas de faute, le notaire engage sa responsabilité. Elle s’articule autour de la responsabilité civile, la responsabilité pénale et la responsabilité disciplinaire.
La responsabilité civile du notaire
La responsabilité civile consiste en l’obligation, pour celui qui commet une faute, de réparer le préjudice causé à autrui. Pour engager la responsabilité civile du notaire, il faut réunir trois conditions cumulatives :
- Une faute doit avoir été commise par le notaire.
- Un dommage doit avoir été subi par le client.
- Un lien de causalité entre la faute commise par le notaire et le dommage subit par le client doit exister. Si le dommage subit n’a aucun rapport avec la faute commise, la responsabilité du professionnel ne peut pas être engagée.
La responsabilité pénale du notaire
La responsabilité pénale implique, pour la personne ayant commis une infraction, de devoir répondre juridiquement de ses actes et de supporter la sanction prévue par la loi. En tant que professionnel, le notaire peut se rendre coupable d’infractions prévues par le code pénal. Il existe à la fois des infractions générales, qui ne sont pas spécifiques au notariat, comme l’escroquerie, et des infractions spéciales, propres au notariat, comme la rédaction de faux actes.
La responsabilité disciplinaire du notaire
Le notaire est soumis à des règles déontologiques. En cas de manquement à ces règles professionnelles, le notaire peut voir sa responsabilité disciplinaire engagée.
Exemples de motifs de litiges avec un notaire
Les motifs de litiges pouvant intervenir entre le notaire et ses clients sont variés.
- Manquement à l’obligation de conseil et d’information. Comme vu précédemment, le notaire doit respecter l’obligation de conseil à laquelle il est assujetti. Autrement, il commet une faute.
- Ainsi, commet un manquement à son obligation de conseil, le notaire qui n’a pas mis en garde ses clients sur le danger encouru en l’absence de clause suspensive d’obtention d’un prêt au sein du contrat de vente, alors qu’ils envisageaient de recourir à un prêt. Au sein de cette même solution, les juges font ressortir le principe bien établi selon lequel la compétence des clients n’exonère pas le notaire de son obligation de conseil.
- « Le devoir d’information et de conseil du notaire rédacteur d’un acte authentique de prêt lui impose d’informer l’emprunteur sur les conséquences de la non-souscription d’une assurance décès facultative proposée par le prêteur ». On le voit par cet exemple, le notaire doit éclairer et mettre en garde les parties sur chaque point et à chaque étape de la mise en œuvre de l’acte authentique.
- Lorsque le notaire est au courant de l’inconstructibilité d’un terrain, il doit en informer les parties au contrat de vente dudit terrain. Ici, le notaire avait connaissance de l’inconstructibilité du terrain objet de la vente, mais n’en a pas informé les parties. La découverte de l’inconstructibilité du terrain avait entraîné l’annulation de la vente pour erreur. La faute du notaire a été estimée comme ayant entraîné l’erreur pour laquelle la vente a été annulée, engageant de ce fait sa responsabilité.
- Négligence. Le notaire peut commettre certaines négligences dans l’exercice de ses missions, entraînant un préjudice pour ses clients. À titre d’exemple :
- En cas d’oubli d’un délai administratif entraînant des pénalités de retard.
- En cas d’oubli d’une servitude qui n’a alors pas été mentionnée dans la vente immobilière.
- Retard. Le notaire, par son statut, est régulièrement chargé d’effectuer diverses formalités liées à ses missions, comme la déclaration de succession après un décès. En cas de négligence entraînant un retard de dépôt, pouvant porter préjudice aux héritiers, le notaire commet une faute. Cela pourra être le cas également, si la publication prévue pour la publicité foncière n’a été faite que plusieurs mois après le délai prévu à cet effet. Néanmoins, pour que cette responsabilité soit caractérisée, il faut apporter la preuve que le notaire n’a pas réalisé toutes les formalités nécessaires pour traiter et déposer la déclaration en temps et en heure. Autrement, il n’a pas commis de faute.
- Facturation excessive. La rémunération du notaire est composée à la fois d’honoraires dont le tarif est réglementé et fixé par décret, et d’honoraires libres. Sa responsabilité peut être engagée s’il ne respecte pas les tarifs réglementés ou si ses honoraires libres sont excessifs et/ou injustifiés.
- Manque d’impartialité. L’obligation d’impartialité des notaires est appréciée de manière très stricte. Les juges rappellent qu’il doit être impartial et objectif. Le notaire qui profite de l’état mental d’une des parties « afin de lui faire conclure un contrat de vente à un prix dérisoire, avec des clauses déséquilibrées et sans cause », au profit de l’autre partie, commet une faute et engage sa responsabilité.
- Non-respect du secret professionnel. Les notaires ne peuvent, en principe, divulguer des informations sur leurs clients à des tiers, auquel cas ils commettent une faute. Cependant, en cas d’autorisation judiciaire délivrée par le tribunal judicaire, le notaire peut être affranchi de ce secret, au regard des intérêts légitimes en cause.
Les différentes procédures de recours à l’encontre du notaire
Recourir à la médiation
En cas de litige opposant un notaire et son client, il est possible de recourir à une médiation. Cette solution est prévue par le code de la consommation, permettant à toute personne de recourir à une médiation si un litige l’oppose à un professionnel. L’intérêt de cette procédure est son caractère amiable : le but est de trouver une solution qui puisse satisfaire les parties tout en maintenant le dialogue, l’écoute et le respect. La rapidité de cette solution amiable contrairement à un contentieux au tribunal est également un atout.
La médiation est menée par un médiateur du notariat. Le médiateur exerce sa mission de façon impartiale et indépendante. Afin de saisir le médiateur du notariat, il faut rédiger une réclamation par écrit, puis l’adresser soit par courrier, soit par courriel. Si les conditions sont réunies, la demande est recevable et le médiateur le notifie aux parties. Une fois la médiation terminée, un courrier de réponse est adressé aux parties afin de leur proposer une solution au conflit. Les parties peuvent accepter ou refuser cette solution. Les parties restent libres d’exercer un recours devant la juridiction disciplinaire ou de saisir la justice.
Saisir le conseil régional des notaires
La saisie du conseil régional des notaires est la procédure de première intention, qui précède la juridiction disciplinaire et/ou la saisie de la justice. Dès à présent, il est possible de recourir à un avocat pour être assisté tout au long du litige. L’avocat pourra alors fournir toutes les informations importantes afférentes au processus. La première étape est d’adresser une lettre ou un courriel au président du conseil régional des notaires ou de la chambre interdépartementale des notaires. Le choix de la chambre interdépartementale se fait en fonction du lieu d’exercice du notaire objet du litige.
À l’issue de cette procédure, le président du conseil régional des notaires donne sa réponse. Il peut :
- Classer l’affaire sans suite
- Proposer une conciliation afin de régler le conflit
- Renvoyer l’affaire devant la juridiction disciplinaire des notaires
Les parties peuvent décider à l’issue de la procédure de saisir la juridiction disciplinaire ou de saisir la justice.
Saisir la juridiction disciplinaire des notaires
En cas de manquement à une obligation déontologique, la personne ayant subi un préjudice peut saisir la juridiction disciplinaire. Le procureur général ainsi que le président du conseil régional ou interrégional des notaires ou le président du Conseil supérieur du notariat en ont également la possibilité. Afin de déposer une réclamation, il est fréquent de faire appel à un avocat, qui saura conseiller au mieux le plaignant sur la démarche à suivre.
Les sanctions encourues sont prévues par une ordonnance du 13 avril 2022 et sont les suivantes :
- L’avertissement
- Le blâme
- L’interdiction d’exercer à titre temporaire pendant une durée maximale de dix ans
- La destitution, qui emporte l’interdiction d’exercice à titre définitif
- Le retrait de l’honorariat
Il reste enfin une dernière possibilité de recours : la saisie de la justice.
Saisie de la justice
La saisie de la justice intervient en cas de faute engageant la responsabilité civile et/ou la responsabilité pénale.
- S’agissant de la responsabilité civile, il convient de se tourner vers le tribunal judiciaire. C’est le juge civil qui traitera cette action. En cas de contentieux inférieur ou égal à 10 000€, la juridiction compétente peut également être le tribunal de proximité s’il existe.
- S’agissant de la responsabilité pénale, il convient de saisir le procureur de la République en déposant une plainte.
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[1] Cour de cassation, première chambre civile, 22 février 2017, n°16-13.096 ; autre exemple : Cour de cassation, première chambre civile, 28 novembre 1995, n° 93-15.659
[2] Voir article 1240 du code civil : « tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».
[3] Cour de cassation, première chambre civile, 9 juin 1998, n° 96-13.785.
[4] Cour de cassation, première chambre civile, 8 janvier 2020, n°18-23.948
[5] Cour de cassation, première chambre civile, 12 juillet 1989, n°88-12.387
[6] Cour de cassation, troisième ch. civ., 29 mars 2018, n°17-13.641 et n°17-13.963
[7] Cour de cassation, première ch. civ., 20 avril 2022, n° 20-23.160
[8] Voir article L.612-1 du code de la consommation : « tout consommateur a le droit de recourir gratuitement à un médiateur de la consommation en vue de la résolution amiable du litige qui l’oppose à un professionnel. À cet effet, le professionnel garantit au consommateur le recours effectif à un dispositif de médiation de la consommation ».
[9] Ordonnance n° 2022-544 du 13 avril 2022 relative à la déontologie et à la discipline des officiers ministériels