Chérie, je peux à nouveau changer les ampoules !
Le 21 mars 2024, la Cour de cassation en formation de section (9 à 15 magistrats) a rendu un arrêt important publié au bulletin et qui fera, en raison de sa portée doctrinale particulière, l’objet d’une analyse dans son rapport annuel.
En résumé, cette décision met fin à la jurisprudence issue de l’arrêt rendu par la 3e chambre civile du 15 juin 2017, selon laquelle les désordres affectant des éléments d’équipement, dissociables ou non, d’origine ou installés sur existant, relevaient de la responsabilité décennale lorsqu’ils rendaient l’ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination (3e Civ., 15 juin 2017, pourvoi n° 16-19.640, Bull. 2017, III, n° 71 ; 3e Civ., 14 septembre 2017, pourvoi n° 16-17.323, Bull. 2017, III, n° 100).
Cette jurisprudence très commentée et controversée en raison de sa contradiction avec la première condition d’accès au régime spécial issue de la Loi dite SPINETTA du 4 janvier 1978 (la construction d’un ouvrage), induisait en outre finalement, davantage de risques que de bénéfices potentiels comme l’explique l’arrêt objet de la présente brève.
Au terme d’une motivation claire et pédagogique, la Cour explique sa décision et revient désormais à une position plus traditionnelle selon laquelle « si les éléments d’équipement installés en remplacement ou par adjonction sur un ouvrage existant ne constituent pas en eux-mêmes un ouvrage, ils ne relèvent ni de la garantie décennale ni de la garantie biennale de bon fonctionnement, quel que soit le degré de gravité des désordres, mais de la responsabilité contractuelle de droit commun, non soumise à l’assurance obligatoire des constructeurs. ».
Nul doute que cet arrêt fera l’objet de nombreux articles et brèves comme la présente dont le titre renvoi à l’expression imagée un brin provocatrice de Claire POITEVIN (Maître de Conférence à l’université de NIMES et de MONTPELLIER) à la lecture de l’arrêt de 2017 précité : « Non Chéri ! Je ne changerai pas cette ampoule ! »
La Cour de cassation nous permettra peut-être, grâce à ce revirement, d’avoir à nouveau la lumière à tous les étages.